Qui veut tuer la gauche ?
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(copie d’un article de revoltes.net du 25/11/2006)
Des militants de divers horizons, communistes du PCF et de la LCR, verts, membres d’ATTAC, socialistes de gauche (si, si, il en reste quelques uns ;-), préparaient depuis des mois une campagne unitaire originale, susceptible d’ouvrir enfin les portes d’une véritable alternative, et non d’une simple alternance sans perspectives de changements réels. José Bové avait mis tout son poids dans ce projet, en insistant bien sur la necessité de l’UNITE pour pouvoir viser un score à deux chiffres, voire battre le PS au premier tour. C’était possible.
Voici un petit rappel intéressant du résultat des premiers tours des présidentielles depuis le début de la 5ième république :
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Premier tour des prési- dentielles (% des inscrits) | Premier tour des prési- dentielles (en % des suffrages exprimés sur les inscrits) | |||||
Gauche | Socio démocrates | Conservateurs | Extrême droite | Abstention | inscrits | |
1965 | (avec Mitterand) | 27% Mitterand +PCF 7 694 005) | 37% De Gaulle Lecanuet 14 605 641) | 4% Tixier-Vignacourt 1 260 208 | 15% 4 656 025 | 28 910 581 |
1969 | 17% Duclos Krivine 5 047 389 | 7% Deferre +Rocard 1 949 692) | 52% Pompidou Poher 15 320 396 | 22% 6 909 437 | 29 513 361 | |
1974 | 2% Laguiller Krivine 689 237 | 36% Mitterand PCF 11 044 373 | 42% Giscard Chaban Royer 12 184 502 | 0.7% Le Pen Renouvin 234 643 | 16% 5 064 317 | 30 602 953 |
1981 | 14% Marchais Laguiller 5 124 979 | 23% Mitterand Crépeau Bouchardeau 8 470 160 | 37% Giscard+Chirac +Debré Garaud 14 306 724 | 19% 7 360 742 | 36 398 859 | |
1988 | 9% Lajoinie Juquin Laguiller Boussel 3 418 469 | 30% Mitterand Waechter 11 517 117) | 29% Chirac Barre 11 095 363 | 11% Le Pen 4 375 894 | 20% 7 722 469 | 38 128 507 |
1995 | 11% Hue Laguiller 4 248 589 | 20% Jospin Voynet 8 108 524 | 30% Chirac Balladur 12 007 692 | 11% Le Pen 4 571 138 | 24% 9 530 279 | 39 992 912 |
2002 | 9.5% Hue Besancenot Laguiller Gluckstein 3 933 773 | 20% Jospin Chevènement Mamère Taubira 8 284 812) | 23% Chirac Bayrou +Madelin Lepage Boutin 9 603 458 | 13% Le Pen Mégret 5 471 739 | 31% 12 696 218 | 41 194 689 |
Que nous apprend ce tableau ?
- le seul parti qui progresse, c’est celui des abstentionistes : presque un électeur sur 3 en 2002 !
- l’extrême-droite progresse régulièrement depuis sa spectaculaire "émergence" lorsque Mitterand a propulsé le F-Haine en le "dédiabolisant", en lui ouvrant la porte des télés. Le F-Haine représente depuis lors à peu près 5 millions de beaufs, dont 1/3 de fachos, 1/3 de conservateurs passés de la droite extrême à l’extrême-droite, et 1/3 qui instrumentalisent les fachos pour protester contre l’immobilisme de l’establishment.
- la droite perd régulièrement du terrain : pour la première fois depuis le début de la cinquième république, moins de dix millions de réactionnaires ont votés pour la droite traditionnelle.
- les socio-démocrates se maintiennent à peu près à 8 millions de voix depuis le début de la cinquième république.
- la gauche a perdu un million de voix en participant à des gouvernements socio-démocrates.
Finalement, les deux mouvements les plus importants, sur le long terme, ce sont la baisse spectaculaire du nombre des conservateurs, et la montée de l’abstention, encore plus impressionante : presque un électeur sur trois !!!
Parmi les votants, le rapport gauche/droite n’a guère évolué :
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Premier tour des présidentielles (% des inscrits) | ||
gauche | droite | |
1965 | 27% | 41% |
1969 | 24% | 52% |
1974 | 38% | 43% |
1981 | 37% | 37% |
1988 | 39% | 41% |
1995 | 31% | 41% |
2002 | 30% | 36% |
Le "coup de tonnerre du 21 avril 2002" ne correspond donc pas à une montée spectaculaire de l’extrême-droite : celle-ci s’est produite avant, en 1988. La défaite du PS est dûe à la division des socio-démocrates, puisque Jospin n’a réuni que 4 610 113 voix sur les 8 284 812 de "centre-gauche". Si Jospin s’est retrouvé derrière Le Pen, c’est parce qu’il n’a réuni que 56% des voix de son camp.
Là est le véritable enjeu des présidentielles 2007 : pour la première fois, la gauche pouvait être majoritaire au premier tour, devant les socio-démocrates. Celà explique la peur panique au PS que suscitait une candidature unitaire autour de José Bové : il pouvait arrivait devant eux au premier tour !!!
Malheureusment, l’alternative unitaire se divise. Des manoeuvres d’appareils aux motivations peu avouables se sont développées :
- ) Les candidatures de diversion pour "affaiblir Bové".
- ) l’insistance du PCF a vouloir présenter sa candidate, Marie-Georges Buffet, en guise de candidate "de rassemblement", malgrès l’absence de soutien en dehors du PCF.
- ) Le refus, réïtéré encore tout dernièrement dans l’huma, de MGB de prendre un engagement clair sur la non-particpation à un exécutif libéral-Royaliste. S’il faut que ce point soit écrit, comme le demande la LCR, alors il faut l’écrire ! A moins d’avoir des arrières pensées en forme de fauteuils ministériels ?
- ) Le refus du débat de la part de soi-disant "communistes" : on ne compte plus les anathèmes désolants, les attaques contre la LCR, contre Besancenot, contre José Bové, ... enfin contre tous ceux, et ils sont les plus nombreux chez les électeurs, qui veulent à la fois un vrai programme de gauche et un candidat qui a des chances sérieuses de le faire avancer.
- ) Les attaques anti-Bové dégueulasses : par exemple de lui reprocher de s’exprimer publiquement ! Et si "on" ne veut pas qu’il le fasse dans le Monde ou dans Libé, pourquoi ne pas le laisser s’exprimmer dans l’Huma ? Qui refuse le débat ??? Qui a peur de sa dialectique réelle ?
- ) Tout le temps perdu à cause de manoeuvres sordides. L’image déplorable que celà donne d’un "rassemblement" qui peine à rassembler, faute d’être clair sur ses objectifs et sur les moyens politiques proposés pour réaliser son programme.
- ) De qualifier "d’anti-communiste" ou "d’anti-PCF" toute critique d’une politique qui semble préférer sauver quelques postes d’élus que sauver la dynamique unitaire ET "le parti". C’est parce que nous avons besoin d’un parti sincèrement communiste que nous critiquons ses erreurs. Ce n’est pas pour "tuer" le PCF, mais pour le faire revivre, à l’heure où j’ai le sentiment qu’il se saborde lui-même ...
- ) Le refus de la proposition qu’avait fait José Bové d’organiser des meetings locaux puis un vote. Avec le recul, c’était une bonne idée, puisse qu’il n’y a pas double ni même simple consensus ...
- ) Le signe négatif et inquiétant donné par le PCF aux municipales de Bordeaux, en préférant l’alliance avec le PS à l’alliance à gauche. Comme c’était prévisible, les résultats de cette stratégie éculée n’ont pas étés mirobolants ...
- ) et cetera ! parce que cette petite liste est loin de faire le compte de toutes les avanies contre un rassemblement unitaire ...
Certe, la LCR "majoritaire", par son intransigeance, n’est pas 100% exempte de responsabilités ... mais il faut mettre UNE chose à son crédit : la LCR s’est montrée claire, constante, et de ce fait intransigeante sur UNE question : elle a exigé que le rassemblement antilibéral prenne l’engagement de ne pas "aller à la soupe" après les élections dans un mauvais remake de la "gauche plurielle". Tout en tentant d’en reporter la faute sur la LCR sans grande finesse, le PCF porte donc l’essentiel des responsabilités dans cet échec actuel du rassemblement : outre les manoeuvres évoquées ci-dessus, il s’est clairement refusé à prendre cet engagement : ne pas aller se compromettre dans un gouvernement et dans des exécutifs qui ne feraient pas une politique de gauche. Le résultat est là : aujourd’hui, la dynamique "unitaire" n’est plus guère unitaire ... De nombreux militants sont écoeurés par ces magouilles. La LCR, fidèle à sa volonté de ne pas tromper les gens, s’est mise en retrait, tout en appellant à de nécessaires clarifications, prête à rejoindre les collectifs dès que les engagements attendus auraient étés pris, et à retirer la candidature d’Olivier besancenot à la Présidentielle. Il y a eu des démissions, dont celle de Raoul Marc Jennar du Collectif National. Et il y a eu le "retrait provisoire de sa candidature", par José Bové, qui a déclaré : "Je n’entends pas, en effet, continuer de servir d’alibi unitaire à d’autres desseins, partidaires ou personnels." (voir notre article à ce sujet).
Malgrès celà, des votes ont eu lieu dans la plupart des collectifs locaux, selon des modalités très variables. A titre d’exemple, dans "mon" collectif local, 16 personnes étaient présentes : 11 membres du PCF, tous assez agés, et 5 "autres", plus jeunes : 1 "vert", un membre d’ATTAC, un "LCR minoritaire", un "je ne sais pas", et moi. Les 11 PCF se sont prononcés pour Marie-Georges Buffet, 4 personnes pour José Bové, et une personne pour Clémentine Autain. Quelle est donc la légitimité de l’addition de semblables caricatures de consultation démocratique ??? Comment le collectif national antilibéral pourra t’il additionner ainsi des "votes" qui n’en sont pas, réalisés selon des modalités variables, et sans que l’essentiel n’ai été fait : rassembler tous les électeurs de la vraie gauche pour leur demander de choisir ??? Que représente le "vote" de 16 personnes sur un territoire qui regroupe plus de 100000 habitants ??? En quoi représente t’il les électeurs de la gauche anti-capitaliste du secteur ? Qui sont plus de 16, en général !
Oh, je sais bien pourquoi le PCF (entre autres ...) ne veut pas de José Bové : pour eux, c’est "un électron libre". mais justement : moi j’attendais cet "électron libre" pour nous changer des gluons qui grenouillent avec le libéralisme pour mieux garder leurs fauteuils !!! C’est pour celà que le PCF a suscité des candidatures de diversion "d’apparentés communistes", comme Clémentine Autain et Yves Salesse.
Néanmoins, l’analyse des évolutions électorales montrent que l’idée d’une alternative UNITAIRE de la vraie gauche était, et reste pertinente. Avec un candidat de la qualité de José Bové, il était, et il est encore possible de battre les socio-démocrates au premier tour. C’est une situation inédite, depuis l’avènement de ce système de monarchie élective qu’est la cinquième république. De quoi convaincre quelques uns des militants du plus grand parti de France : celui des abstentionistes. Parce que l’abstention a toujours été plus forte à gauche qu’à droite, un bon candidat pouvait, et peut encore, créer l’évènement. Le 10 décembre, nous saurons en principe à quoi nous en tenir. Ce qui est sûr, pour moi, c’est que je ne cautionnerais pas par mon vote les magouilles qui ont eu lieu. Je voterais à gauche (je ne suis pas abstentioniste), pour José Bové s’il est candidat unitaire, et pour Olivier Besancenot sinon. Comme José Bové, je n’entend pas servir d’alibi unitaire à d’autres desseins, partidaires ou personnels. Une seule chose m’importe vraiment : la victoire de la gauche. La vraie.
Minga "Parce que le vrai courage est de faire ce qui est juste"
De : Minga
samedi 25 novembre 2006